Électriser le « Lac des cygnes »
Réactiver un classique avec une fougue électrisante : voilà le pari de Swan Lakes, un spectacle moderne de Gauthier Dance, la compagnie allemande du Québécois Éric Gauthier. De la danse de haut calibre à voir au Grand Théâtre le 22 avril 2024.
Conte de fées allemand
Avant de devenir l’un des directeurs artistiques les plus courtisés des deux côtés de l’Atlantique, Éric Gauthier a d’abord été une étoile du ballet. À 18 ans, il a quitté le National Ballet of Canada à Toronto pour le Stuttgart Ballet, en Allemagne, où il a joué les princes et les héros pendant toute sa vingtaine. «À 30 ans, j’ai décidé que j’en avais assez de porter mes collants blancs. Je voulais rester en danse, mais aller du côté de la danse moderne», raconte-t-il.
Le directeur du Theaterhaus Stuttgart, une grande institution de la ville d’adoption du Québécois, lui offre alors de fonder sa propre compagnie. Gauthier Danse naît en 2007 : « Quand j’ai dit oui, je n’étais vraiment pas prêt à être directeur, à prendre en charge la vie de six danseurs, d’un maître de ballet… Mais j’ai plongé. J’avais de belles idées, de grandes idées! Aujourd’hui on emploie, sur scène et en coulisses, 36 personnes. »
En janvier, Gauthier Dance a lancé une compagnie junior, qui compte six interprètes de 18 à 23 ans. Ce sera toutefois la compagnie principale, qui compte huit danseurs et huit danseuses, qui viendra au Québec ce printemps danser Swan Lakes.
« Tous les interprètes ont une formation en danse classique, mais ce sont vraiment des caméléons. On change souvent de style et on travaille avec des chorégraphes de grande renommée, qu’on invite en résidence », indique Gauthier, dont le point de référence est la compagnie néerlandaise Nederlands Dans Theater.
Swan Lakes d'Hofesh Shechter - Photo : Jeanette Bak
Mourir 100 fois
Lorsqu’il était soliste pour le Stuttgart Ballet, Éric Gauthier est mort 100 fois en interprétant le prince du Lac des Cygnes. « En quittant le ballet classique, j’ai dit aux journalistes qui me demandaient si ça allait me manquer que je ne m’ennuierais pas de mourir sur scène encore et encore, et que maintenant, j’allais vivre », se souvient-il, encore amusé par la formule.
Le solo de trois minutes de la mort du prince, un des plus connus de l’histoire de la danse, lui a inspiré le projet Dying Swans, qui a contribué à la renommée de Gauthier Dance en Allemagne et au-delà. « On planifiait Swan Lakes, la pandémie est arrivée, et j’ai pensé à ce projet parallèle de solos, pour faire danser les interprètes malgré les restrictions. On a travaillé avec 16 chorégraphes à distance, 16 cinéastes pour capter les performances et 16 compositeurs pour créer de la musique. »
Cette œuvre qui a permis d’employer 64 artistes en pleine pandémie a été achetée par de grandes chaînes de télé européennes et a valu au directeur artistique les félicitations officielles du président allemand.
Signé Marie Chouinard et Hofesh Shechter
Swan Lakes, au pluriel, propose les visions fortes et éclatées de la chorégraphe québécoise Marie Chouinard et du chorégraphe israélien établi à Londres Hofesh Shechter. « Je leur ai proposé de se laisser inspirer par un élément de l’histoire du ballet, qui a une multitude de textures, comme la noyade du prince ou la beauté du cygne », souligne Gauthier.
Marquée par le son percussif des pointes des ballerines dans le ballet original, qui fait penser à des coups de becs, Marie Chouinard a imaginé un escadron de huit danseuses en tutu, à la chevelure blanche et aux yeux irréels, avec une pointe en guise de main. « Ce sont des figures envoûtantes, qu’on ne peut pas quitter des yeux, et qui s’expriment d’une manière très affirmée, puissante, vocale », décrit le directeur artistique.
La pièce Le chant du cygne : Le lac se déroule sur la musique du compositeur montréalais Louis Dufort, alors que les images vidéo, en arrière-fond montrent des eaux tranquilles qui s’embrasent.
Hofesh Shechter s’est quant à lui impliqué dans tous les paramètres de sa proposition, baptisée Swan Cake. Il a chorégraphié et composé la musique, tout en participant aussi à la conception des éclairages et des costumes. Le chorégraphe utilise le mouvement frénétique et coordonné des ailes pour créer un électrisant effet de groupe. « Il a conçu des mouvements tentaculaires, volumineux. C’est de la danse pour aujourd’hui, qui réveille notre appétit pour en voir plus. Les jeux de lumières sont toujours fantastiques, les costumes très cool et colorés », explique Gauthier.
L’énergie d’Ohad Naharin
La deuxième partie du programme sera consacrée à une œuvre iconique d’Ohad Naharin, Minus 16, dans laquelle le réputé chorégraphe réarrange et connecte des morceaux de son répertoire pour les adapter à l’époque et à la compagnie qui l’interprète.
« Un homme danse pendant tout l’entracte et lorsque le public revient, d’autres danseurs se joignent à lui et ça commence, raconte Gauthier. Dans cette pièce-là, il y a une scène très connue, avec un grand cercle de chaises, où les interprètes se lèvent pour faire une vague, en se déshabillant à chaque fois. Il y a aussi un pas de deux plein de volupté, sur un air d’opéra. Puis une scène époustouflante, que je ne peux pas vous dévoiler, mais que le public apprécie toujours. »
Les mots d’ordre de cette présentation de Gauthier Dance : énergie et connexion. « Le programme est tellement majestueux qu’il en devient contagieux », promet Éric Gauthier.
Minus 16 d'Ohad Naharin - Photo : Jeanette Bak
Vous voulez en savoir plus?
- Explorer les œuvres de Marie Chouinard : https://www.mariechouinard.com/fran%C3%A7ais/oeuvres-1/
- Découvrez le travail d’Hofesh Shechter : https://hofesh.co.uk/productions/
- Apprenez-en plus sur le chorégraphe Ohad Naharin : https://batsheva.co.il/en/home/
Gauthier Dance sera de passage au Grand Théâtre le 22 avril 2024, réservez vite vos places!
https://grandtheatre.qc.ca/programmation/gauthier-dance-swan-lakes/
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