L'art cinétique : créer le mouvement
Avec la création de son nouvel espace d’expositions d’œuvres en arts visuels numériques, le Grand Théâtre propose de vous faire découvrir la diversité des pratiques actuelles en arts numériques.
Ici, dans le contexte de ces chroniques, notre commissaire aux arts visuels numériques Ariane Plante, s’affairera à explorer et démystifier, de manière simple et souvent ludique, différents aspects de ces formes d’art pour vous les faire découvrir, connaître et comprendre. Votre expérience face aux œuvres que vous pourrez admirer lors de votre prochaine visite au Grand Théâtre n’en sera que bonifiée!
Introduction à l'art cinétique
Qu’est-ce que l’art cinétique?
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Le terme cinétique prend sa source dans le grec ancien « kinêtikos » qui signifie « qui se meut, qui met en mouvement ».[1] L’art cinétique, considéré plus comme une appellation qu’un courant artistique en soi, est pour ainsi dire la forme d’art s’intéressant à « ce que l’œil humain perçoit comme du mouvement »[2]. C’est l’art qui crée le mouvement – ou l’illusion de mouvement –. Et ce mouvement, qui se manifeste tant dans des œuvres bidimensionnelles, par des jeux optiques, que tridimensionnelles, avec des volumes animés, peut être engendré par l’œuvre elle-même, si elle est susceptible de bouger, ou encore impliquer le déplacement du spectateur. En somme, l’art cinétique repose essentiellement sur le caractère changeant de l’œuvre, sur sa capacité à se transformer sous l’effet du mouvement.[3]
Du constructivisme aux pratiques actuelles, un art protéiforme
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En regardant une petite vidéo vraiment intéressante et amusante, produite par le Centre Georges Pompidou à Paris, j’ai appris que l’art cinétique prenait sa source dans le constructivisme et le futurisme, deux courants artistiques du début du XXe siècle, et que l’artiste russe Naum Gabo, ainsi que les célèbres Marcel Duchamp et Alexander Calder en sont considérés parmi les pionniers.[4]
Par la nature des outils et des procédés à partir desquels ils travaillent et par les notions qui animent leurs recherches, les créateurs d’aujourd’hui, et je pense ici particulièrement à ceux qui œuvrent dans le champ des arts numériques et des nouvelles écritures artistiques, se sont appropriés la cinétique sous toutes ses facettes et ce, de vraiment belle façon! Si bien que je serais portée à dire que cette idée de mouvement, qu’il soit donné à la matière, au son ou à l’image, qu’il engage le corps ou convoque l’intervention du visiteur, est presque intrinsèque aux pratiques dites « numériques », ou à tout le moins, « technologiques ».
Nature – vent et énergie solaire par exemple –, mécanique, action manuelle, lumière, électricité, électronique, motorisation, cybernétique, vidéo ou optique, les procédés à l’origine du mouvement des œuvres cinétiques sont multiples, ce qui en fait une forme artistique très hétérogène[5], mais à tout coup, une expérience perceptive singulière.
L’art vivant et la matière en mouvement : le travail extraordinaire de Diane Landry
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La ville de Québec compte dans sa communauté artistique une figure majeure des arts actuels au Québec et au Canada, une artiste qui maîtrise à merveille l’art envoûtant de la cinétique. Je vous présente la sculptrice et performeuse Diane Landry, que nous aurons l’honneur d’accueillir au Grand Théâtre en 2021. En création dans son atelier du quartier St-Roch, elle prépare une nouvelle œuvre cinétique, que je trouve personnellement d’une grande douceur poétique, et que nous présenterons en primeur au Studio.
Les deux principaux axes de la pratique de Diane sont transfuges et s’influencent l’un l’autre. Nous retrouvons en effet dans ses sculptures des aspects performatifs et dans ses performances, des éléments sculpturaux.
« Depuis le début de ma pratique professionnelle en 1987, je réalise des performances en parallèle de ma pratique sculpturale. […] C’est en développant ces actions que j’ai commencé à me familiariser avec les notions temporelles et à les intégrer dans mes œuvres installatives ». [6] - Diane Landry
La route parachute, Diane Landry, 2015
Des outils technologiques pour créer des œuvres « Mouvelles »
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L’artiste intègre à son travail des dispositifs technologiques qu’elle fabrique elle-même et qui lui permettent de transfigurer des objets du quotidien et de donner vie à l’inanimé. Par exemple, l’électronique, la lumière et la mécanique lui ont permis de transformer des parapluies en fleurs, de changer des clés de maison en carillon, de métamorphoser un panier de plastique pour la lessive en rosace de cathédrale.[7] Et dans plusieurs de ses œuvres, les mécanismes et les systèmes électroniques, qui génèrent le mouvement, sont laissés à vue.
Chevalier de la résignation infinie, Diane Landry, 2009
« Montrer les filages, mettre à nu les systèmes électroniques et les réseaux qui font circuler l’électricité, c’est montrer l’énergie et l’influx qui nourrissent les objets et les mettent en mouvement ». - Diane Landry
Elle a même inventé un beau néologisme pour qualifier la rencontre du mouvement et de la temporalité dans ses pièces installatives. Elle parle « d’œuvres Mouvelles », qu’elle définit ainsi : « une œuvre matérielle qui nécessite un certain temps d’observation pour être appréhendée dans son intégralité […] une œuvre Mouvelle existe dans un temps renouvelé, car sa nature impose un espace-temps ». [8]
Serait-ce donc juste de dire que l’art visuel peut aussi être ce que l’on nomme de l’art vivant?
« La performance est un art vivant. La cinétique me permet de donner vie à des objets et des matières inertes, à une sculpture et de les amener à se déployer dans un espace-temps, à « performer » en quelque sorte ». - Diane Landry
École d’aviation, Diane Landry, 2000
Des œuvres visuelles vivantes, des sculptures qui offrent un spectacle, n’est-ce pas un beau trait d’union entre l’espace d’exposition du Studio et les arts scéniques qui sont au cœur des activités du Grand Théâtre de Québec?
Je me garde de vous en parler davantage pour le moment même si ça me brûle de vous dévoiler la nouvelle création de Diane Landry, mais nous voulons vous réserver la surprise… Restez à l’affût!
[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Cinetique
[2] https://www.kazoart.com/blog/focus-sur-lart-cinetique/
[3] Ibid
[4] Pour en apprendre davantage sur l’histoire de l’art cinétique, je vous invite à lire cet article très accessible réalisé par le Centre Georges-Pompidou : http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-cinetique/ENS-cinetique.html
[5] https://www.youtube.com/watch?v=NYQ7mna1zFA&list=PL5RSjCvtcKQjCPTF08InvZnYkE1hyj_t9&index=6&t=0s
[6][7][8] http://dianelandry.com/a-propos-about/demarche-statement/
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