Photo de la chronique

Au fur et à mesure que l’encre du compositeur imbibe la feuille blanche, le document se transforme, il devient partition.

Un amalgame de silences, de crescendos et de notes qui, en mode pause, resteront muettes… ivoire et ébène, noir et blanc, comme un vieil écran cathodique demeuré ouvert qui attend le début des programmes.

C’est là que le miracle se produit, ce moment où le directeur musical, le chef d’orchestre, peint la partition; son pinceau est sa baguette. Il saupoudre çà et là sa saveur, sa vision, son élan créatif… c’est la naissance de la couleur.

Après un an à la barre de l’Orchestre symphonique de Québec, tout semble indiquer que le public aime cette touche de renaissance, de postmodernisme, d’expressionnisme que Clemens Schuldt projette dans ses tableaux musicaux, et ils sont nombreux à vouloir découvrir son musée. D’où vient cet élan créatif? Nous lui avons demandé.

Clemens, cette créativité qu’est la vôtre, d’où vient-elle?

Vous allez rire, mais je crois tout simplement au pouvoir de la musique. J'aime faire vibrer les gens pour quelque chose et l’Orchestre m’offre cette opportunité, je peux enfin tout mettre en œuvre.


Peut-on développer sa créativité ou bien l’est-on de façon innée?

Je pense que tout le monde naît créatif! Mais plus on grandit, plus il faut oser et avoir le droit d'échouer. Pour ce faire, il faut avoir l'espace nécessaire, cela commence dès l'enfance à la maison ou à l'école et se poursuit dans la vie professionnelle : il faut surtout se poser la question, est-ce que mon entourage, mon milieu de travail m’encourage à la développer?


Avant de diriger une œuvre, écoutez-vous d’autres chefs qui ont dirigé la même œuvre - avec les Spotify de ce monde on peut en écouter beaucoup - ou si au contraire, vous préférez ne pas vous laisser influencer par ce qui a déjà été fait?

Bien sûr, j'aime me laisser inspirer - cela forme même l'oreille, car on écoute généralement des enregistrements de très grande qualité. Mais je m'arrête délibérément quelques semaines avant le concert pour trouver ma propre version.


Parfois, lorsqu’on écoute des enregistrements, on peut dire : « Ha! Ça, c’est Karajan ». Est-ce qu’il y a un style Clemens Schuldt?

Je pense que mes parents reconnaîtraient une symphonie de Mozart que je dirige! Mais j'aimerais répondre modestement en vous disant que je suis toujours en mode recherche et que je veux continuer à évoluer. J'aime cependant une certaine vivacité d'expression et la représentation d'un véritable drame émotionnel - je dirige toujours avec ma tête et mon âme en même temps. Il y a donc aussi beaucoup de ma personnalité dans les interprétations.


Quelle touche créative apportez-vous à l’Orchestre symphonique de Québec?

On peut facilement le voir à travers les après-concerts que j’ai implantés où j’amène nos solistes complètement ailleurs ou encore dans le cadre des activités Extra-Muros; nous entrons encore plus en contact avec le public à l’extérieur de nos salles de concert, et c’est important pour moi. J'aime travailler avec des artistes invités qui sont également à l'aise de sortir de leur zone de confort, c'est-à-dire prêts à associer la musique classique à d'autres traditions musicales du monde.


Et vous réussissez à contaminer les musiciens et à en faire des créateurs à leur tour?

C'est ce que j'aime le plus dans mon métier : j'aime prendre en compte les idées des musiciens. C'est la seule façon de créer quelque chose de spécial!


Et le public dans tout ça?

Il reçoit notre musique et devient à son tour un créateur d’émotions, de rêves… je pense qu'il suit cette voie! Et ce n'est que le début...!

L'Orchestre symphonique de Québec a récemment lancé sa programmation 2024-2025. C'est à découvrir!

Plus récentes chroniques