Photo de la chronique
Photo : Marc-Étienne Mongrain

Benoît Pinette, alias Tire le coyote, nous partage ses plus récentes découvertes dans cette nouvelle chronique de la série Curieux de Culture, entièrement dédiée à des artistes d’ici.

Rallumer la mémoire

Le poète-compositeur-interprète nous amène sur les traces de musiciens, d’auteurs et d’artistes visuels dont la démarche fait écho à la sienne. Il évoque des créations qui allument des étincelles dans son cœur et dans sa tête.

Amoureux des mots, avec une prédilection pour la forme courte, il puise dans sa bibliothèque des ouvrages qui l’ont ému récemment. En 2021 aux éditions La Peuplade, il a lui-même publié un recueil de poésie, La mémoire est une corde de bois d’allumage, « un chantier d’inquiétudes et de certitudes éphémères » autour de l’enfance. Lors de ses spectacles, il n’est pas rare qu’il invite un ou une poète local(e) à venir lire sa prose.

Tant en arts visuels qu’en musique ou en littérature, les démarches qui le touchent ravivent souvent des pans oubliés de notre passé collectif. Elles sont toutefois toujours bien ancrées dans le présent et charment les sens et l’intelligence de ceux qui s’y attardent.

Plongez avec curiosité dans l’univers de Tire le coyote, qui présente une supplémentaire de son spectacle Au premier tour de l’évidence au Grand Théâtre le 7 janvier.


Musique – Cédric Dind-Lavoie

Contrebassiste de formation, Cédric Dind-Lavoie est un musicien québécois aux multiples talents et aux nombreux projets. Il a joué au sein du trio de jazz expérimental Misc, mené par Jérôme Beaulieu, et a lui-même un quartet à son nom qui navigue entre jazz, néoclassique et musique du monde. Il a fait paraître deux albums de ses compositions, Mismar en 2015 et 88 en 2018, où il mêle piano, contrebasse, percussions et échantillonnage.

Son dernier projet en lice, Archives, a été lancé au printemps 2022. Il y marie des musiques folkloriques sur bobine ou sur vinyle à des airs ambiants et introspectifs. « Il y a des chansons traditionnelles a cappella, des reels à l’accordéon, des tapeux de pieds. Il a superposé une musique très belle, organique et mélancolique, sur ces enregistrements-là, explique Benoît Pinette. Il devient accompagnateur de ces artistes qui ne savaient pas qu’ils en étaient. Ça m’a touché. C’est un des albums que j’écoute sans arrêt dernièrement. »

Curieux?

  • Écoutez l’album Archives sur le Bandcamp du musicien.
  • Lisez cet article de Panm360 sur son projet.
Cédric Dind-Lavoie
Cédric Dind-Lavoie à la contrebasse (crédit : Julie Blanche)


Photographie et poésie – Marc-André Foisy

Musique, peinture, photographie et poésie sont autant de matières qu’utilise Marc-André Foisy pour exprimer sa vision du monde. L’artiste pluridisciplinaire établi à Montréal a été le lauréat de l’édition 2021 du Cabaret Festif en marge du Festif de Baie-Saint-Paul. Son premier album Mémoires, qui vient de remporter le Félix pour la pochette d’album de l’année, s’inspire de centaines d’heures de visionnement d’archives vidéo familiales. Il a été réalisé par Antoine Corriveau et rassemble Salomé Leclerc aux percussions, Adèle Trottier Rivard aux voix et Cédric Dind-Lavoie à la basse et à la contrebasse. Son folk mélodique s’orne d’instruments d’orchestre comme le cor français, la clarinette et le basson.

Ses photographies font partie du livre photographique En bas de la côte, qui dépeint les réalités des quartiers Centre-Sud et Hochelaga-Maisonneuve à Montréal, et accompagnent le recueil Forêt en chambre de Chantal Ringuet, tous deux parus aux éditions Le Noroît.

Son livre Je ferai battre le cœur des pommes, qui vient tout juste d’arriver en librairie, contient des photos et pour la première fois, ses mots, qui ont trouvé un bel écho chez Tire le coyote. « On est tous les deux dans le court poème citation-réflexion, souligne-t-il. Il est très mélancolique, nostalgique et contemplatif dans son écriture et ça rejoint un peu ma démarche. »

Curieux?

  • Voyez les poèmes et les photos de Marc-André Foisy sur Instagram.
  • Visionnez cette vidéo de sa prestation aux Francouvertes en 2019.
"Je ferai battre le cœur des pommes" de Marc-André Foisy
Couverture du recueil de poèmes de Marc-André Foisy


Poésie – Camille Readman-Prud'Homme

Après avoir complété une maîtrise en création littéraire à l’Université du Québec à Montréal, Camille Readman-Prud’homme poursuit ses études à l’Université de New York, où elle s’intéresse à l’expression de la vulnérabilité en littérature.

Paru en mai dernier chez L’Oie de Cravan, son livre Quand je ne dis rien je pense encore a remporté le prix Alain-Grandbois de l’Académie des arts et des lettres du Québec et le Prix des libraires du Québec. Fouillant les mécanismes d’archivage de la mémoire et des échanges chargés de non-dits, ses poèmes visent juste.

Notre curieux de culture a d’ailleurs recommandé le recueil à de nombreuses personnes de son entourage. « C’est assez fascinant. Elle a un grand pouvoir d’observation. Elle prend des choses hyper-banales du quotidien, des choses qu’on vit quand on va à la caisse, à la pharmacie ou qu’on parle à un ami et elle décortique le rapport à soi et à l’autre », explique-t-il.

Il s’est procuré l’ouvrage de Camille Readman-Prud’homme au Salon du livre de Montréal en 2021, où il faisait lui-même la promotion de son recueil. « La poésie est un travail passionné et il faut vraiment y croire pour le faire. On se doit d’avoir un grand respect pour ce type d’artistes-là. »

Curieux?

Couverture du livre de Camille Readman-Prud'homme
Couverture du livre de Camille Readman-Prud'homme


Musique – Myriam Gendron

Auteure-compositrice-interprète, Myriam Gendron est née à Ottawa et habite maintenant Montréal. Elle a repris des poèmes de Dorothy Parker sur son premier album Not So Deep as a Well (2014). Le second, Ma délire - Songs of love, lost & found, est une relecture contemporaine de la musique populaire du continent.

Le folk, pour elle, est presque une forme littéraire. Elle a trouvé des textes sur lesquels elle a mis de la musique, et de la musique sur laquelle elle a mis des textes, elle a pris des chansons existantes sur lesquelles elle a changé des accords. « C’est vraiment un bel album de folk contemporain qui puise dans les racines de la musique traditionnelle d’ici, autant francophone qu’anglophone », observe Benoît Pinette. « J’aime ce type de démarche indépendante. J’ai l’impression que ce sont des œuvres qui vont traverser le temps. »

Curieux?

Pochette de "Ma délire" de Myriam Gendron
Pochette de l'album "Ma délire"


Arts visuels et cinéma – Martin Bureau

Peintre et documentariste renommé, Martin Bureau habite la ville de Québec, où il est représenté par la Galerie 3. Ses œuvres font partie de nombreuses collections privées et publiques, dont celles de l’Assemblée nationale et du Musée national des beaux-arts du Québec.

Son court métrage sur l’univers déjanté des derbys de démolition, L’Enfer marche au gaz! a raflé trois prix au Gala Prends ça court, en 2016. Son projet Les murs du désordre, à la croisée du cinéma documentaire, de la recherche en géopolitique, de la peinture et de l’installation vidéo, a remporté des prix nationaux et internationaux, en Suisse, en Allemagne et aux États-Unis.

Dans toutes les sphères de sa pratique, Martin Bureau s’intéresse aux tensions géopolitiques, aux enjeux environnementaux et à l’impact des comportements humains avec un mélange d’acuité, de tension dramatique, d’humour et de tendresse.

« Je trouve qu’on a un peu le même rapport, lui en arts visuels et moi en musique, au fait qu’on est remplis de paradoxes, souligne notre curieux de culture. J’aime les émotions que son art suscite. On est à la fois révolté par les problématiques qu’il soulève et emballé par la beauté de la chose. »

Martin Bureau a réalisé plusieurs pochettes d’albums pour Fred Fortin, Gros Mené et Tire le coyote. L’image emblématique de Au premier tour de l’évidence est tirée de sa série Saint-Déluge-de-la-Consolation et met en vedette une ancienne église sur la 1ère avenue, à Limoilou. « Quand il travaillait sur cette série-là, j’habitais juste à côté de l’église et je servais un peu d’informateur sur l’état d’avancement de la démolition, donc je me suis senti impliqué dans sa création, raconte Benoît Pinette. Il puise lui aussi à la mémoire collective. On détruit nos églises pour faire des condos, sans vision à terme de notre patrimoine. Je ne suis pas religieux, mais j’accorde une importance au sacré. »

Sainte-Déluge-de-la-Consolation 4 de Martin Bureau
"Saint-Déluge-de-la-Consolation 4" de Martin Bureau. Aquarelle sur papier Arches monté sur bois, 122 x 183cm, 2020

Curieux?

  • Lisez la démarche de Martin Bureau et voyez ses œuvres sur son site Web.
  • Visionnez le webdocumentaire Les murs du désordre.
  • Lisez cet entretien sur les pochettes d’album qu’il a réalisé dans Paroles & Musique.


Arts visuels – Marie-Jeanne Decoste

Benoît Pinette réside entre le quartier Limoilou à Québec et Sainte-Élie-de Caxton, le village au cœur des contes de Fred Pellerin, en Mauricie. Il a eu un coup de cœur pour le travail d’une artiste de sa région d’adoption, Marie-Jeanne Decoste, dont il possède deux œuvres.

Marie-Jeanne Decoste a étudié les arts visuels à l’Université de Trois-Rivières et est membre de l’atelier Presse Papier. Établie à Saint-Justin, celle-ci aborde l’imaginaire de l’arrière-pays de manière contemporaine à travers un mélange de plusieurs techniques : dessin, peinture, collage et juxtaposition de photos anciennes.

« On voit des ouvriers, des pêcheurs, des agriculteurs, des églises, c’est vraiment très beau et très doux la manière dont elle forge ses œuvres », note Tire le coyote.

Curieux?

  • Apprenez en plus sur son travail en visitant son site Web.
  • Voyez son travail et celui d’autres artistes de la Mauricie sur le répertoire DICI.

"Bestiaire" de Marie-Jeanne Decoste
"Bestiaire" de Marie-Jeanne Decoste


Soyez curieux!

Et surtout, ne manquez pas la supplémentaire de Tire le coyote le 7 janvier 2023!

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